Une histoire dans ma vie… Une histoire “La mienne”.
Je ne suis pas un MECANO, mais un bricoleur plein d’ardeur et passionné. J’ai un HOBBY.
Une VOITURE, c’est d’abord un rêve, disait Enzo FERRARI.
Ma passion de l’automobile remonte à ma plus tendre enfance. Dès l’âge de douze ans, j’avais la folie des belles américaines que je dessinais, en leur donnant des formes et des puissances fantastiques.
La soif d’apprendre me dirigeait droit chez un garagiste près de chez moi, où je passais la plupart de mon temps pour voir “comment cela fonctionnait”.
A 18 ans mon permis de conduire en main, je prends du service au volant. C’est à cette période que je fus atteint d’un virus : La recherche, avoir de l’avance, du pas comme les autres…
Mes parents avaient une Peugeot 403, une très bonne voiture pour l’époque (1957), mais un peu molle… Qu’à cela ne tienne ! On rabote la culasse, on change le carburateur… ce fut ma première TRANSFORMATION.
En 1961 ma première occasion : une ID 19 que j’achète avec mes économies dès l’âge de 24 ans, j’en suis très fier… Et ce fut ma deuxième TRANSFORMATION. Cette voiture était très agréable à conduire une fois lancée, mais quelle lourdeur au démarrage, il fallait y remédier. Mon idée était de modifier certains aspects de la mécanique, une culasse avec des soupapes à grand diamètre, deux doubles carburateurs avec pipe d’admission spéciale (intérieur poli). Le résultat fut très satisfaisant.
Un jour, je vis une Panhard 24 CT avec ses doubles phares, puis me vint une inspiration. Pourquoi ne pas les intégrer dans les ailes de l’ID 19, à la place de ces gros phares ronds qui manquaient de continuité harmonieuse avec la ligne du capot ?
Ma troisième TRANSFORMATION : Je dégote deux ailes de 24 CT chez un carrossier. On découpe, martèle la tôle, soude, puis c’est le pointage des phares et voilà ma voiture métamorphosée. Celle-ci était munie des doubles phares avant Citroën mais non pivotants.
Je ne revendique pas être le premier inventeur à avoir fait cette modification. J’espère retrouver une photo de cette métamorphose que je joindrai à d’autres documents.
Au fil des années, je suivais l’évolution des DS et ID 19, toutes les améliorations étaient automatiquement remontées sur ma voiture pour faire croire au dernier modèle.
Un jour, j’aperçus une voiture américaine avec un volant de forme bizarre, concave à droite et à gauche en position de conduite 9 heures 15, et légèrement bombé en position 12 heures 30, cela ressemblait au style aviation.
Alors me voilà reparti pour une nouvelle transformation, avec le monobranche de Citroën, mais le résultat fut décevant pour les manœuvres car la ligne 9 heures 15 était plus longue que celle de 12 heures 30.
Le VIRUS s’incruste ; j’observe un cendrier aux trois coins arrondis, (très à la mode à l’époque). Tiens donc comme c’est drôle ! il a une belle forme. Je le prends en main, le fais pivoter, EUREKA, j’ai trouvé : un triangle mixtiligne pour mon nouveau volant qui lui, sera inédit. Lorsqu’il fut réalisé, celui-ci me donna entière satisfaction.
J’ai parcouru près de 50 000 km avec ce volant insolite, sans problème pour la manipulation. Je m’attaquais à d’autres élaborations sur cette voiture bizarre : trappe au travers du coffre pour les skis, lumière verte au tableau de bord (plus reposante) essuie-glace arrière, etc.
Puis un jour j’ai vendu cette voiture, mais l’acheteur ne voulait pas de ce volant à cause de la réglementation du Service des Mines. Cette esquisse est toujours en ma possession pour un futur montage… La vente de cette voiture n’était pas le but de me séparer de Citroën, mais pour acquérir une DS 21 “Pallas cuir” accidentée (15 000 km au compteur) pour un prix très modique.
La difficulté de ce véhicule était le remplacement de la coque. Le hasard voulut que Citroën à Strasbourg ait en sa possession la coque d’une ID à 50 % de sa valeur pour défauts du tableau de bord, pas insurmontables, mais qui demandaient quelques réparations (2 jours). J’étais plein de vitalité ! alors j’en fis l’acquisition, puis au travail…
Mes parents, mes copains m’ont qualifié de “FOU”. Pour entreprendre un tel travail il me fallait avoir des connaissances professionnelles, des compétences mécaniques, puis l’outillage…
Restant indifférent à ces propos, je m’aventure dans ma nouvelle profession de “mécano”. En fin de parcours, je m’inquiétais pour le réglage de la boîte hydraulique et les hauteurs du véhicule. Je me suis heurté à plusieurs embûches car certaines pièces devaient être montées avant d’autres. Il fallait démonter, recommencer le travail maintes fois jusqu’à ce que je décèle le bon assemblage. La besogne fut longue (4 mois), je n’en voyais plus le bout. Mais tout a une fin… Le résultat étant positif cela a été une récompense à ma peine et à mon ardeur… et pied de nez à mes copains !…
Ayant la carcasse de ma DS 21 nue, j’ai poussé l’insonorisation avec environ 50 kg de Blaxon, doublé les moquettes, feutré, etc.
A tel point que pour le montage de certaines pièces il me fallait des vis plus longues. Ma voiture était silencieuse, presque comme une AMERICAINE. A cause de ce travail (d’Hercule), mes défenses naturelles m’ont abandonné… c’est à ce moment là que la terrible maladie m’a frappé de plein fouet, le VIRUS s’est incrusté davantage en moi.
DIAGNOSTIC : Atteint au plus haut degré, sans espoir à jamais de guérison.
CONCLUSION : Je survivrai coûte que coûte avec les rechutes qui s’imposent.
Pendant la reconstitution de cette DS 21, le VIRUS mitonnait dans mon cerveau… Je me disais : “On peut mieux faire, pourquoi Citroën n’a t-il pas encore inventé le “Coupé” ? Une illumination surgit en moi…
Je sautais de joie comme un gamin en quête d’une trouvaille, une voiture à tendance sportive de haut niveau. Depuis la disparition de FACEL, la France n’avait plus de voitures de prestige.
Je crois bien que je suis “FOU” : J’ai décidé de la créer ! Papier, crayon, en moins d’une heure je définissais les grandes lignes, ce fut magique !
Départ sur la base d’une plate-forme DS, je conserverais les 4 places, la porte papillon assez grande pour donner l’accès à l’avant et l’arrière en même temps. Voie arrière élargie pour obtenir un grand coffre, un moteur 6 cylindres “OUI, Messieurs”.
C’est en 1964 que je l’ai imaginée. Il n’y avait pas d’espionnage ni de fuite chez Citroën mais peut-être des transmissions de pensées ou de la télépathie ?
La voiture ne devrait pas dépasser 5 mètres de long, 1,85 à 1,90 m de large, 1,35 m de hauteur. Bien joli tout ça, mais là vraiment, tout seul c’est impossible. Il fallait former une équipe de volontaires (des passionnés comme moi).
Le premier copain, un dessinateur dans tous les sens du terme, un artiste, il savait tout faire, instruction de très haut niveau (Math Sup.), un inventeur… C ‘est lui qui tailla la maquette dans le bois de Balsa. Cette réduction devait être allongée puis arrondie ainsi qu’à l’arrière, très large et plat selon mes directives. Elle ressemblait déjà à une Testarossa qui n’existait pas à l’époque. On relèvera sur la photo ci-jointe le décrochement de l’aile arrière comme sur la SM et la XM.
Le deuxième copain, un ingénieur en électronique, me proposa un tableau de bord avec un écran, type télé, affichage avec cristaux liquides (le progrès prématuré).
Le troisième copain avait un atelier de construction mécanique et des mains en “or” car il refaisait n’importe quelles pièces, même un pignon de boîte avec trempage, etc.
Le quatrième copain savait travailler la fibre de verre.
Le cinquième, “l’illuminé”, le touche-à-tout… Moi.
Nous avions de l’audace et décidions de foncer têtes baissées dans le brouillard, vers ce fabuleux exploit qui nous attendait.
Les ennuis commencèrent : La boîte Citroën ne peut s’inverser, le V6 de Fiat ne marchera pas. Si seulement j’avais connu M. LOIZEAU à cette époque ! Nous ne pouvions pas reprendre les glaces de la DS car notre prototype avait une trop grande surface vitrée. Le coût de fabrication de St Gobain était excessif, cela nous découragea dans notre fabuleuse aventure et nous n’avions pas pensé au Plexiglas. Les sponsors et mécènes : nous n’en connaissions pas à l’époque !
Alors la mort dans l’âme, nous avons décidé d’abandonner notre projet inaccessible. Ce fut en 1965 que le Destin me laissa choir.
J’attire votre attention sur notre plan qui n’a de ressemblance avec la SM que par l’idée du Coupé Sportif haut de gamme et par ses dimensions qui sont presque les mêmes. Laissons à César ce qui est à César, mais l’idée était là !
Sans tous ces problèmes nous aurions pu mettre cette voiture en marche au moins trois ans avant la SM… Les preuves de cette histoire sont bien minces, car il me reste un seul croquis sans date, ma maquette et mon volant mixtiligne sans oublier ma bonne foi. Qu’importe si l’on ne m’a pas pris au sérieux, mais retracer ces souvenirs, mon “histoire”, cela me réchauffe le cœur et me réconforte de toutes ces idées d’inventeur.
1970, elle est enfin née cette Super Citroën, la SM celle que l’on convoitait tant. Lorsque je l’ai vue, j’ai eu un pincement au cœur, elle était devant moi, j’ai pu la toucher, mon rêve était concrétisé. Pendant un instant j’eus l’impression que l’on s’était approprié mes idées. Une sensation de colère m’envahit, mais la raison l’emporta. Dans mon for intérieur, je donne un grand coup de chapeau à tous ceux qui ont travaillé sur ce modèle !
Nous avions eu la même vision…
J’attendais 1973 pour m’acheter cette SM, toujours d’occasion, une 71 Carbu. Mon premier voyage fut Strasbourg “via la Camargue”. Quel confort !… Puis vinrent les contrariétés avec ma femme. C’est qu’à chaque arrêt, elle me réclamait le volant, il fallait presque se battre comme des enfants avec notre nouveau jouet. Au bout de 6 heures de route, sous la pluie, la Camargue nous laissait indifférents. Nous décidions donc de traverser la France, via le Mont Saint-Michel. Peu importe, du moment que nous roulions, au diable les kilomètres… Arrivés au Mont St-Michel, après 14 heures de route, nous sortions de cette voiture sans aucune courbature, frétillants et frais comme des gardons ! presque… Le confort une fois de plus représente un atout dans un véhicule lorsque l’on entreprend de longs trajets.
Mais un jour, les vrais ennuis mécaniques s’enchaînèrent. La pompe à eau, la pompe à huile, le joint de culasse, embiellage, j’ai eu droit à tout. Cela me coûta fort cher et me dégoûta du moteur Maserati.
Une idée me vint : Puisque la boîte est celle de la DS, adaptons-lui un moteur de DS 21 qui est plus fiable. Une fois de plus, une TRANSFORMATION en vue, elle fut réalisée assez rapidement. Ce n’était plus la même voiture : au moins 60 chevaux manquaient à l’appel. J’aurai dû changer le couple conique de la boîte 8 x 35 par celui du Break 7 x 34, gagnant en nervosité par sa démultiplication plus courte, mais perdant en vitesse de pointe.
Puis avec le temps je commençai à être un peu las de tous ces travaux dont je ne voyais pas le bout. Alors d’un coup de tête je décidais de vendre ma SM… mon rêve s’envola ! Lorsque ma voiture quitta notre cour avec son nouveau propriétaire, j’ai eu comme un sentiment de culpabilité.
Je changeais donc mon fusil d’épaule, de la traction je passais à la propulsion, une Mercedes 280 CE coupé, grande caisse, toujours d’occasion. Quel silence ! Et une puissance de 185 CV, mais la tenue de route décevante, dure… car j’avais en mémoire la sécurisante SM. C’est là que j’ai compris qu’il ne fallait pas s’en défaire. Malgré cela j’ai gardé la Mercedes assez longtemps.
Lorsqu’un jour de balade en montagne avec ma femme, j’ai eu l’occasion de talonner une SM ! Fier de mes 185 CV et empli d’un esprit de compétition, j’ai voulu la distancer. A chaque virage, que je prenais pleins gaz, la SM était toujours derrière moi, j’étais obligé de ralentir sérieusement de peur de me retrouver à l’envers, face à elle. Alors le citroëniste qui sommeillait en moi, se réveilla.
“Si l’on vendait la Mercedes ?” dis-je à ma femme ! Sans hésitation, elle me répondit : “Ce n’est pas trop tôt”. Elle m’en a toujours voulu d’avoir vendu notre Rêve (la SM) ! Je vends donc la Mercedes et reprends une SM 73 injection et je fus fou de joie pour quelque temps. Mais la fatalité s’est abattu aussitôt sur ce moteur presque maudit : joint de culasse, chemise fêlée, pompe à eau… quelle poisse ! Nouvelle déception ; n’ayant pas le temps de réparer, je fais l’achat d’une CX 25 Turbo essence qui me donne entière satisfaction, ayant actuellement 168 000 km au compteur, sans aucune panne et un moteur de 170 CV. Voilà ce que Citroën aurait dû placer dans la SM. Avec l’amélioration de la technologie actuelle, elle vivrait encore et tiendrait la dragée haute à bien des voitures et il faudrait inventer de nouveaux superlatifs pour la qualifier.
En 1988, j’ai fait connaissance de votre Club dont je suis membre depuis cette date. J’ai repris les travaux sur la SM, la vraie - car j’en possède une autre qui a un moteur de CX 25 Turbo essence pour rouler tous les jours. Celle-ci a été transformée par M. LOIZEAU (CHOLET), un génie ! (cet homme devrait se trouver à la tête d’un bureau d’études). La SM ne sera opérationnelle qu’au printemps 1993. Une fois de plus je suis parti d’une épave, puis ai remis à neuf toute l’hydraulique, freins, suspension, direction, cardans, sellerie, etc. Le VIRUS a refait surface, histoire de ne pas perdre la main. Cela ne me suffit pas, car je crois que je suis un insatisfait de nature. Je combats sur dix fronts à la fois.
Pour clore le tout, un ami encore plus “fana” que moi de la SM me fit part de ses intentions. Je n’ose pas vous le dire : “Attachez bien vos ceintures (de sécurité). Vous allez nous prendre pour des “fous”.
(Revoir chapitre du diagnostic du VIRUS). Car ce que vous allez lire peut provoquer des troubles graves chez les personnes sensibles…
POURQUOI NE PAS RECONSTRUIRE LA SM ! Plus “fous” que nous, tu meurs !… peut-on le dire ?
Mon ami “fana”, il faut que je vous le présente : c’est un ingénieur en électronique, inventeur à l’occasion, parcourant la France à longueur d’année, pour y rencontrer des professionnels de toutes branches (même des anciens de Citroën, réveillant en eux le VIRUS SM) afin de glaner par-ci, par-là, de précieux renseignements de tout ordre. De quoi faire du bon boulot. Mais après maintes discussions, hélas ce projet s’avéra pratiquement irréalisable “à titre privé”.
LE VIRUS SE RENDORT, MAIS IL NE S’ETEINDRA POINT !
QU’EN PENSEZ-VOUS ?
L’abandon de la SM mérite encore aujourd’hui SANCTION. Cette décision reste IMPARDONNABLE, “MALGRE LES IMPERATIFS DE L’EPOQUE”, les problèmes auraient pu être résolus.
L’arrêt de fabrication fut une solution navrante de facilité (l’affaire était classée).
A QUI DOIT-ON CETTE CONDAMNATION ?
SMent Vôtre Marcel MARCOT